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La Blairelle en colère
27 février 2017

Tu leur fais trop d'honneur

Sur Facebook, je suis très engagée. Je partage beaucoup d’articles, que je commente la plupart du temps. Je partage aussi souvent des contenus problématiques afin de les dénoncer, d’expliquer ce qui ne va pas, etc. Et régulièrement, j’ai des gens, de tous genres, en général bien intentionné.e.s, qui viennent me dire que c’est faire trop d’honneur aux auteur.ice.s de ces contenus que de les partager sur des réseaux sociaux. Et c’est un point de vue que je comprends.

 

Alors pourquoi est-ce que je le fais ?

 

Il y a plusieurs raisons pour lesquelles je continue de dénoncer ce genre de contenus. D’abord, le patriarcat, le racisme, le classisme, le capacitisme/validisme, etc, toutes ces formes d’oppressions sont des formes d’oppressions systémiques. Cela veut dire qu’on les retrouve à tous les niveaux de la société, même à des niveaux qui peuvent sembler anodins. Mais plus ça semble anodin, plus cela peut influencer profondément et durablement notre manière de penser. Il me semble donc logique de les dénoncer de manière systématique, à chaque fois que je les rencontre. Un système contre un autre, en quelque sorte.

 

Ensuite, lorsqu’on m’insulte moi, en tant qu’individu, c’est à moi de décider si je veux répondre à l’insulte ou non. Je peux décider de me draper dans ma dignité, détourner le regard et ignorer l’outrage. C’est mon choix pour une situation qui ne concerne que moi. Mais lorsque je suis en face de quelqu’un tenant des propos misogynes (par exemple), ce n’est pas uniquement moi que cette personne insulte, c’est toutes les personnes appartenant au genre féminin.

Il y a peut-être des femmes qui ont envie de répondre, envie de dénoncer mais qui n’en ont pas les moyens matériels, intellectuels ou culturels. Or moi, j’ai les moyens matériels, intellectuels et culturels de répondre, donc je considère comme de mon devoir de le faire, pour celles qui ne le peuvent pas. Il y a des jours où je ne peux pas répondre, où je n’ai pas le temps, où je dois faire passer mon bien-être mental en premier parce que je suis au bord de la crise de nerfs, et ces jours-là, j’apprécie quand quelqu’un d’autre le fait pour moi.

 

Et puis après, ça c’est ma façon de voir, mais je trouve qu’il est parfois trop facile de détourner le regard et de laisser les gens tenir leurs propos dans leur coin. On a l’impression que leur coin à eux est tout petit et qu’ils ne font pas beaucoup de mal, mais finalement, est-ce qu’on le sait vraiment ? Est-ce qu’un.e misogyne jamais contredit.e ne fait pas du mal à sa fille, à sa sœur, à une amie, à une collègue trans qui a peur d’entamer sa transition ? Est-ce que cette fille, cette sœur, ces femmes, n’ont pas besoin d’entendre cette personne être contredite ? Est-ce vraiment une solution de le.a laisser sévir dans son coin, juste parce que son coin ne touche pas le nôtre ? Voilà qui serait très confortable pour les personnes problématiques : ne jamais être mis en face de ce qu’elles disent parce que finalement c’est leur faire « trop d’honneur ». Eh bien je préfère leur faire trop d’honneur que leur laisser trop de confort. Ces personnes veulent tenir des propos problématiques ? Fort bien, mais je ne me gènerai pas pour dénoncer ces propos pour ce qu’ils sont, et je ne me gènerai pas pour en parler en public et inviter les gens autour de moi à y réfléchir également.

 

Enfin, « trop d’honneur »… Vraiment ? C’est faire honneur à quelqu’un que de dénoncer ses propos comme étant misogynes, racistes, classistes, capacitistes/validistes, etc ? Moi j’appelle ça plutôt coller la honte… Donc voilà tant qu’il me restera une étincelle de colère et un souffle de voix, je continuerai à dénoncer les propos problématiques que je rencontre, aussi anodins, inoffensifs et marginaux qu’ils puissent sembler. Parce que c'est un privilège que de considérer ces propos comme "mineurs" ou "peu importants", un privilège parce que cela veut dire que je ne suis pas directement victime de leur forme d'oppression. C'est un privilège que je ne souhaite pas exercer.

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